Entré en vigueur le 1er juillet dernier, l’arrêté du 16 avril 2024 relatif à l’information des consommateurs sur le prix des produits dont la quantité a diminué1 et modifié (déjà) par un arrêté du 28 juin 20242 (« Arrêté ») a fait, beaucoup de bruit, dès son annonce par le ministère de l’économie.
En effet, l’ensemble des acteurs concernés ont fait entendre leur voix à commencer par Bercy, Bruno Le Maire qui dans le communiqué de presse annonçant la prochaine parution de l’arrêté n’a pas hésité à qualifier la shrinkflation d’« arnaque »3.
Les industriels s’en défendent pourtant et mettent en avant le « contexte inflationniste inédit4» qui rend nécessaire une adaptation de leurs produits.
Les distributeurs, eux, parlent d’un texte qui est « à côté de la plaque » et dénoncent l’ajout de nouvelles obligations alors même qu’ils ne contrôlent pas les quantités des produits vendus par les industriels5.
Les associations de consommateurs, quant-à-elles, pointent du doigt les imperfections du dispositif dont l’efficacité est questionnée tant les moyens de le contourner seraient nombreux.
Quelle obligation au titre de l’arrêté Shrinklation et qui est concerné ?
L’arrêté met en place une obligation d’information dans les magasins au détail de plus de 400m2, relevant du secteur de la distribution à prédominance alimentaire, selon laquelle ces distributeurs doivent informer les consommateurs d’une diminution de quantité et d’une augmentation du prix d’un produit appartenant à la catégorie des produits dits de grande consommation.
Ne sont donc pas concernés :
- Les industriels qui ne possèdent pas de magasin de détail tels que visés par l’arrêté,
- Les distributeurs opérant dans un autre secteur à savoir, par exemple, le e-commerce,
- Ou encore les distributeurs visés par l’arrêté sur la partie drive comme le confirme la FAQ élaborée par la DGCCRF (« FAQ »)6.
Qu’est-ce qu’un produit de grande consommation ?
Les produits de grande consommation (« PGC ») sont définis par l’article L.441-4 du Code de commerce. Il s’agit des produits non durables à forte fréquence et récurrence de consommation et dont la liste est précisée à l’article D.441-9 du Code de commerce.
Sont ainsi des PGC :
- Les produits alimentaires et aliments pour animaux,
- Mais également les produits du quotidien tels que les appareils non électriques, les articles d’hygiène, les produits de beauté etc.
Quelle forme doit prendre cette information ?
L’information doit être effectuée par voie d’un affichage comportant la mention « Pour ce produit, la quantité vendue est passée de X à Y et son prix au (préciser l'unité de mesure concernée) a augmenté de …% ou …€. »
Cette mention est imposée par l’arrêté et les professionnels ne peuvent pas y déroger.
Par ailleurs, cet affichage doit être indiqué de façon visible et lisible sur le produit lui-même – sans toutefois masquer les informations obligatoires ou essentielles pour le consommateur7 – ou à proximité de ce dernier dans une même taille de caractères que celle utilisée pour l'indication du prix unitaire du produit.
Quand y-a-t-il shrinkflation au sens de l’arrêté ?
La FAQ souligne le fait qu’il y a shrinkflation au sens de l’arrêté lorsque les deux conditions cumulatives suivantes sont réunies :
- Une réduction de la quantité vendue et,
- Une augmentation du prix ramené à l’unité de mesure ou à l’unité.
Cela signifie-t-il que toute réduction de quantité accompagnée d’une augmentation de prix ramenée à l’unité de mesure doit-elle être signalée par un affichage ?
Quid des produits vendus en grand format que le professionnel décide de vendre également en format petit ?
La FAQ précise que l’objectif de l’arrêté est de prévenir les cas dans lesquels « les consommateurs ne se rendaient pas compte des modifications de quantités (par exemple, diminution des parts individuelles de fromage à tartiner de 20g à 18g). En revanche, si le nouveau format est suffisamment différent du précédent pour exclure toute confusion (par exemple, une bouteille d’eau d’un litre remplacée par une bouteille de 50 centilitres), le consommateur n’est pas susceptible d’être trompé, il y a lieu de considérer que c’est un nouveau produit pour lequel il n’y a pas de comparaison possible avec un modèle antérieur.8 »
La FAQ ne définit pas ce qu’est un « nouveau produit » laissant cette appréciation aux industriels.
Elle précise néanmoins que ce dernier doit subir un changement substantiel tel qu’une modification de sa formule. Ainsi, une simple innovation de packaging n’est pas, selon la FAQ, suffisante pour constituer une telle modification substantielle9.
La ligne de démarcation entre innovation packaging et changement de format peut sembler mince. Les industriels et distributeurs devront donc se positionner, chacun de leur côté, quitte à prendre des positions contraires et tendre une fois de plus leurs relations.
Et pour cause, ce sont les distributeurs concernés qui portent le risque de sanction qui est de
15 000€ pour une personne morale et 3 000€ pour une personne physique10.
1Arrêté du 16 avril 2014 relatif à l’information des consommateurs sur le prix des produits dont la quantité a diminué
2Arrêté du 28 juin 2014 modifiant modifiant l'arrêté du 16 avril 2024 relatif à l'information des consommateurs sur le prix des produits dont la quantité a diminué
3« Shrinkflation » : publication de l’arrêté ministériel réglementant l’information des consommateurs sur l’augmentation des prix des produits dont la quantité a diminué, communiqué de presse du Ministère de l’économie
4Réponse de Findus suite à la communication du groupement Intermarché reprise dans la presse
5La loi « anti-shrinkflation » pas encore en vigueur mais déjà jugée inefficace, Arthur Quentin, Ouest France, 24.05.24
6FAQ sur la mise en œuvre de l’arrêté du 16 avril 2024 relatif à l'information des consommateurs sur le prix des produits dont la quantité a diminué ; question n°5
7Question n°15 de la FAQ
8Question n°3 de la FAQ
9Question n°14 de la FAQ
10Art. L.131-5 du Code de la consommation
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